Coming-out

Ça m'a pris beaucoup de temps à faire ce processus... surtout envers moi-même. J'ai toujours eu une attirance envers les hommes... mes amis d'enfance... mais je le réprimais, ou je pensais que c'était parce que j'étais tellement "en manque" que mêmes le faire avec des gars m'excitait. J'étais persuadé d'être "straight"
En fait, c'est bien simple, être gai, c'était mal vu dans mon entourage. On se traitait de tapette, de fifs, tout le temps, de manière dégradante, on riait d'eux. J'ai intériorisé cette homophobie et je l'ai exprimé envers d'autres gens qui agissaient plus effiminés que la normale. Et je faisais partie de ceux qui étaient catégorisés comme fifs...
Ça remonte à la 3e année de primaire - j'arrivais à une nouvelle école, et dès la première journée, je me suis fait un ami -Bruno. Le contact fut instantané. On était inséparables. Mais très vite les autres élèves ont vu que nous étions très proches - on se faisait même des massages - nous étions très tactiles, mais pas dans un but sexuel, je n'avais aucune arrière pensée par rapport à ça, nous étions juste bien. Mais dès ma tendre enfance, tout de suite j'ai associé "gai" a quelque chose de négatif, qui cause le rejet des autres.
Je n'ai pas été confronté à mes attirances homosexuelles car je dealais avec des gros problèmes de confiance en soi. En effet, en plus qu'on me traitait de fif à outrance, on disait sans cesse à quel point j'étais laid, même mes amis. Alors évidemment, avec une confiance à 0, impossible d'avoir le courage de demander à une fille de sortir avec moi... voire même de parler à quelqu'un. C'est vraiment en sortant de ce cercle d'amis, et entrant dans le cégep que j'ai pu me débarrasser de mes préjugés. Je m'étais fait de nouveaux amis, et beaucoup d'amis en ligne - je passais beaucoup de temps sur les forums. C'est là que j'ai pu m'exprimer et finalement accepter le fait que - oui - j'étais en fait attiré envers les hommes, et pas les femmes.
Le sentiment est incroyable. Une libération extrême, un sentiment de renouveau, d'excitation, de bonheur... c'était incroyablement positif, et je voulais vivre ça à fond.

Ensuite, j'ai pu le dire progressivement à mes amis, au début à ceux qui n'étaient pas si proches de moi, de façon virtuelle, puis de plus en plus avec les gens que je cotoyais à chaque jour, puis finalement à ma famille. Mais je détestais l'idée de devoir "annoncer" ça, pour moi c'était d'une certaine façon me stygmatiser, en déclarant une "différence" ainsi. Mais ça devenait nécessaire car je commençais à sortir avec un garçon.... et je ne voulais pas cacher ça.

Quand t'es gai, t'es contraint de refaire ton coming out sans arrêt.

Ma grand-mère a été la première à le savoir dans ma famille. Ce n'était pas une bonne idée de lui dire en premier. Mais elle m'a posé la question directement, et je ne pouvais mentir. Elle s'en doutait bien, c'est quand même obvious. Elle m'a regardé d'un air qui m'a tué - de la manière qu'on regarde quelqu'un qui nous annonce qu'il a un cancer. Un impuissance face à une tragédie. Tellement overdramatic. Mais bon, que veux-tu, c'est ça quand tu viens de la religion et d'une culture stricte. À ce moment-là, je consultais un psy parce que je me sentais anxieux et j'avais de la difficulté à garder le moral (faire le coming out était une source d'anxiété, d'ailleurs). En téka, pendant des semaines (je la vois souvent) elle me demandait de parler au psy pour trouver un remède. Me guérir.

Bref, ma grand-mère ne voulait pas que je le dise à mon grand-père. Il avait eu de graves problèmes au coeur dans le passé, et il est vieux. Elle me disait que si je le dis à lui, il ne l'acceptera jamais, il me reniera et je le rendrais malade. Indirectement, elle me disait que mon égoisme de vouloir annoncer ma déviance au grand jour serait la cause de sa mort.

Je l'ai dit à mon frère peu après; ça a été super. Mon frère est super. Mes parents peu après; mon père a simplement acquiescé la chose, mais pour lui ça lui était égal. Tant que tu vas à l'Université et que tu ne prennes pas de drogues, c'était son objectif pour nous. Ma mère l'a pris étrangement. J'imagine que c'était assez tabou dans son milieu. Elle l'a pris personnel, comme si elle devait faire un deuil. Ça m'a choqué au début, mais au final rien n'a changé entre nous, et il n'y a eu aucun problème.

Seule hic, c'est que tout le monde a entré dans la game de ne disons rien au père-grand. Ils me disaient tous à quel point c'était pas nécessaire, voie déplacé de parler de mon orientation sexuelle à mon grand-père. Je suis d'accord à une certaine mesure, ça ne regarde pas mon grand-père, mais là, j'étais rendu avec un copain depuis plus de 2 ans, ça va vraiment bien, et je ne peux plus faire semblant que c'est mon ami durant les partys de Noel où mon grand-père est présent. Les gens voulaient pas comprendre, pour eux, l'homosexualité, ça se vit dansla chambre...mais l'hétérosexualité se vit en chambre et en public. Je n'ai jamais accepté cette injustice. Au final c'est mon copain qui a tranché - il a dit qu'iln'allait plus jouer le jeu d'hypocrisie et qu'il fallait que je choisisse entre l'inclure a ma famille comme membre entier ou l'apparence que je projette a mon grand-père. C'en fut assez pour mettre mes priorités en place.

Le lendemain matin, juste avant le travail,j'ai appelé mon grand-père pour lui dire. Je me suis enfermé dans le sous-sol pour faire l'appel. J'étais tellement nerveux. Je n'arrivais pas àlui dire. Il a bin fallu que je le dise. Et une fois fait, il n'y a pas eu de crise du tout. Il juste dit qu'il aimait pas ça, mais que c'était ma vie. Il disait qu'un homme c'est pas supposé faire ça - je lui ai dit clairement que jen'allais pas accepter être traité moins qu'un homme. Et c'en fut réglé. Notre relation est meilleure maintenant - il parle a mon copain, il s'amusent ensemble. Ce n'est pas parfait - mes grand-parents s'assurent que cela ne se fasse pas savoir chez les grands oncles et grandes tantes en Grèce, mais ça m'est égal. Une fois que je l'ai dit à mon frère, mes parents et grand-parents, les autres ça m'était égal.